09.11
Résumé
Après 2 Fêlés réussi en 2014 puis 2018 et une tentative avortée en 2017, me voici prêt à tenter la marche au dessus : le farfelu mais très très confidentiel « Défi Bugiste« . Tout juste 110 détenteurs depuis la création du défi en 2004… Au programme, 4 ascensions du col du Grand Colombier (1498m), 2 ascensions du col de la Biche (1310m). 208km d’un circuit en double 8… un peu plus de 7000m de dénivelé positif…
Il faut bien l’avouer, sur le papier déjà, ce défi inquiète… 😉 !
1) Grand Colombier depuis Culoz : 18,3 km / D+ 1262 m / Pente moy 6,89% / Pente max 14%
2) Col de la Biche depuis Champagne-en-Valromey via Brénaz : 13 km / D+ 840 m / Pente moy 6% / Pente maxi 12%
3) Grand Colombier depuis Anglefort : 15,7 km / D+ 1221 m / Pente moy 7,77% / Pente maxi 14%
4) Grand Colombier depuis Artemare via Virieu-le-Petit : 15,9 km / D+ 1243 m / Pente moy 7,81% / Pente maxi 22%
5) Col de la Biche depuis Gigniez : 14 km / D+ 1009 m / Pente moy 7,5% / Pente maxi 12%
6) Grand Colombier depuis Champagne en Valromey via Lochieu : 19,2 km / D+ 1042 m / Pente moy 6,75% / Pente maxi 14%
Il est un peu plus de 7heure du matin et l’air est tout particulièrement frais… Je vais entamer cette journée par le versant le plus agréable du Géant, Culoz. D’autant plus agréable aujourd’hui que la route est réservée aux cyclistes, comme c’est le cas à chaque journées cyclos du Grand Colombier (une initiative du conseil général de l’Ain). Pas de voitures donc, mais de très nombreux cyclistes (650, un record) venus à la concentration du Club des Fêlés du Grand Colombier pour en défier les pentes ….
Culoz est le plus beau versant, avec Daniel, nous sommes d’accord. On y traverse d’abord quelques vignes, puis les Esses étroits s’enchaînent avec une vue absolument magnifique sur le lac du Bourget. Il y a ensuite un long replat pour se refaire la cerise avant la rampe à 14%. La dernière partie enfin, très sauvage même si depuis le passage du Tour les barrières cannadiennes ont été retirées et du fil électrique installés pour garder les vaches dans les prés. La Biche elle garde encore cet avantage. Et puis lorsque l’on est au sommet, on peut avoir le privilège, si la météo le permet, d’admirer le Mont Blanc avec juste ce qu’il faut de recul… Vraiment, le plus beau versant, et c’est pour cela qu’il faut commencer par celui-ci, pour être bien sûr de ne pas le rater… !
De la cîme de mon premier Colombier je suis redescendu prestement vers Champagne-en-Valromey. Puis, via Brénaz, j’ai grimpé, une première fois, le Col de la Biche… J’y ai croisé des cyclos éclairés qui savaient ce que signifie « pédaler dans le Bugey »… Petit plateau. Grand pignon… La Biche est aussi voir plus sauvage que son grand-frère… Toute aussi respectable. Alors quand au sommet, je désespère de trouver la pince pouvant valider ma carte de route… Je me rassure… Un peu plus tard, je remonterai…
Au terme d’une descente prudente et groupée, nous nous séparons… Je vais maintenant rejoindre Anglefort, pour la troisième ascension de ce défi pas comme les autres… Le ciel s’est un peu dégagé, mais les températures restent malgré tout assez faîches… Ce qui d’une certaine façon, n’est peut-être pas plus mal… Anglefort, je trouve un peu de réconfort à l’épicerie du village. D’un coup précis, le pain est coupé en deux. Le jambon, attrapé et tranché avec juste l’épaisseur que je souhaitais… Je complète d’une canette et d’un cake aux fruits confits… Mon péché comme d’autres aiment les galettes… Ma montre indique 11heurs 35, l’heure de ravitailler. Je repars. Allure poussive. Ce versant m’a toujours paru sous-estimé. C’est long, et sans temps morts. De plus, la végétation dense. Laissant la pente. Comme seule distraction. Et puis enfin, on rejoint la route de Culoz. La route toujours raide. Mais on y voit du monde. Certains surnagent. D’autres bataillent. Ceux qui par chance descendent, grimacent de plus belle… Leur bras recevant à eux seuls, la charge de leur corps… Le Grand Colombier est un mythe. Et il se mérite. Parmis les sifflements des roues, quelques encouragements. La fiereté fait le reste. Dressé sur les pédales. Equilibre précaire. Tout va bien. Michel me voici… Comprenez Michel Pélissier, l’émérite président de cette Confrérie. Un grand cycliste. Un amoureux du Bugey. Un Monsieur que j’ai eu grand plaisir à rencontrer…
C’est donc en ce début d’après-midi que je suis redescendu à Artemare, par Lochieu comme cela m’a été conseillé. Ce qui me marque d’abord, c’est la température qu’il règne ici. Il fait chaud, très chaud même. Ce défi Bugiste est vraiment difficile,et les changements de températures constants entre le pied et le sommet n’y sont pas étranger. Je tourne un peu, cherchant une boulangerie ou un bar pour pointer ma carte. Tous sont fermés. Il n’y a que ce restaurant mais la terrasse bondée promet de très longues minutes d’attentes. Finalement, je me résoud à pousser la porte du tabac situé au coin de la rue… Je rentre et commence à expliquer l’objet de ma demande. Le gérant est très sympatique mais un peu incrédule quand au défi entreprit. Il a bien vu quelques cyclistes faisant les quatres montées ces dernières années mais les six ne font pas légion. Nous discuterons comme ça quelques minutes. De la beauté de la région. De la difficultée du relief. Du plaisir d’aller librement. Au moment de m’en aller, il me fera même un petit cadeau qui jouera beaucoup par la suite. Un petit sachet d’Haribo, « pour participer« , me dit-il. A ce buraliste, je dis ici. Merci.
Voici venu le gros morceau de la journée. Artemare, par Virieu-le-Petit. Son mythique mur au delà des 20%. Une exponentielle quasi-parfaite 6, 8, 10, 12, 14, 20 puis 22% au plus fort de la pente ! Je ne dirais pas que ce versant est agréable. Mais son profil extrême participe à rendre ce défi vraiment hors-norme. Cette rampe, une nouvelle fois, je l’ai passé. En chaussettes, et je n’en ai pas honte. Une aventure comme celle-ci se gère, autant physiquement que moralement. Et j’ai senti ici, que marcher augmenterait mes chances de réussite. La Selle-de-Fromentel enfin. Je remonte sur le vélo. Eprouvé. Mais pas couché. Le final de ce coté est sublime. L’herbe rase des alpages. Et cette croix. Métallique, énorme, et d’une certaine manière. Bienveillante.
Encore une fois je suis descendu, mais j’ai très vite senti que ça n’irai pas. Trajectoires hésitantes, frissons et les paillettes devant les yeux. Continuer ainsi ne serait pas prudent, et je décide de m’arrêter. Dans un champ, un peu avant l’entrée d’Anglefort. Je machouille le reste de mon sandwich, un peu hébété. Puis m’allonge pour m’endormir quelques minutes. Après avoir un peu hésité, je suis tout de même reparti mais l’abandon n’était vraiment pas loin… Je fais les comptes. Il m’en reste deux. Une Biche. Un Colombier…
Cette deuxième Biche est celle qui se monte depuis Gignez. Je suis parti du fond du trou, au sens propre comme au figuré… Le premier kilomètre donne déjà le tempo avec 9,8% de moyenne pour quitter le village, dûr dûr ! ça se calme ensuite pendant un kilomètre avant un nouveau kilomètre à 9,6%… Les deux kilomètres suivants à plus de 10%… je zigzague, je le peux, la route est désormais déserte. 11 kilomètres en tout pour rejoindre le plateau (13,8 kilomètres pour rejoindre le col à 1325m) ça fait très très mal… Je m’accroche, le mental est là. Enfin le lieu-dit « Sur Lyand », j’y suis presque, plus que deux kilomètres à plus de 8% et je me trouverais sur le plateau. Je me sens mieux. Et continue à m’alimenter régulièrement. Cette fois la fringale est passée. Et je retrouve le plaisir de pédaler. Dans cette arène isolée et préservée. Dans cette lumière. Dans ce silence.
Champagne-en-Valromey. Me voici une nouvelle et dernière fois au pied de la montagne. Je lève un peu la tête. Il me faudra encore une fois aller là-haut. Et je me demande bien comment je vais pouvoir y arriver… Les six premiers kilomètres jusqu’à Lochieu, peuvent être qualifiés de faux plats montant… La suite, un peu moins mais après tout ce qui a été fait jusque là, je qualifierais presque le versant de facile… Enfin, disons, un peu moins difficile… Nous sommes déjà en septembre et les journées sont courtes. Je suis désormais à mi-pente et la lumière a fortement déclinée… Le Grand Colombier est maintenant couvert de sa cape d’invisibilité… Crac… J’entends un craquement derrière moi et j’accélère, un brin froussard… Seul dans la nuit, j’avance vers la fin de mon défi. Partagé entre soulagement et tristesse. Je suis cuit. Carbonisé. Mais je viens de vivre une journée assez unique. Dans cette dernière rampe, je repense à mon premier Felés. Cette même émotion. Cette même fiereté. Aujourd’hui je vais cocher la case au dessus. Près de 14heures, pauses comprises, à déméler cette longue corde, un noeud après l’autre. Pour mon plus grand plaisir… 😉
« En contemplant au loin la Croix du Colombier,
Assis sur le talus je me mis à penser :
Quel bonheur de pouvoir pédaler,
C’est un plaisir si simple, sans cesse renouvelé.
Venez donc sur les pentes du Géant du Bugey,
Mettez ces ascensions dans vos futurs projets.
Vous deviendrez un membre de la confrérie,
Un très bel objectif pour cycliste aguerri… »
(Henri Dupraz)
Homologation
Fiche
Descriptif :
Parcours : #LeDéfiBugiste
Région : Rhône-Alpes
Dépt : Ain
Ville de départ : Culoz (01350)
Difficulté : Très Haute
Distance : 208km / Dénivelé : 7043m
Durée : 13 heures 03 minutes (14heures avec les pauses)
Sport : Cyclisme Route
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